Conférence d’honneur de la FCCT sur l’intersection entre les collectivités PANDC et l’économie solidaire
Le 17 novembre 2022
Vancouver, Colombie-Britannique
Cette séance comporte des exposés de trois présentatrices dynamiques :
- Dionne Co de Solid State Community Industries
- Susanne Redekop de Freedom Dreams Co-operative Education
- Juliet ‘Kego Ume-Onyido de la Black Women Professional Worker Co-op
Dionne Co, Solid State Community Industries
Dionne a abordé le thème de l’économie solidaire comme un moyen différent de prendre part à l’économie, un qui privilégie le bien-être des personnes et de la planète plutôt que le perpétuel appât du gain capitaliste. Elle a rappelé qu’une véritable économie solidaire passe par l’entraide, la démocratie et l’équité. Dionne a ensuite présenté Solid State et ses cohortes, et les différents services de développement qui y sont proposés. Son organisme a adopté des postures en faveur des immigrant·e·s et des réfugié·e·s et contre la xénophobie et le racisme dès sa création. Cela était inévitable dû à son emplacement à Surrey, en Colombie-Britannique, ville dont la forte population immigrante et réfugiée lui a d’ailleurs valu le stéréotype d’une zone de violence entre gangs, de drogue et de criminalité. Dionne a conclu en partageant son expérience de l’économie solidaire dans son pays d’origine, les Philippines. Dans des quartiers défavorisés de la communauté, des femmes cuisinent et vendent des gâteaux à la mangue pour gagner de l’argent. Par exemple, une mère monoparentale de cinq enfants vend ses gâteaux et, en retour, les membres du voisinage lui fournissent les ingrédients nécessaires à leur confection. Ainsi, grâce à l’entraide collective, de nombreuses personnes parviennent à gagner leur vie.
Susanna Redekop, Freedom Dreams Co-operative Education
Plutôt que se présenter en énumérant ses titres universitaires et professionnels, Susanna s’est décrite comme une mère de trois enfants. Elle a également offert d’autres détails sur sa vie en dehors de ses expériences de travail et d’études. Ces propos témoignent de ses 12 années d’engagement dans le secteur coopératif, où les individus sont considérés dans leurs dimensions relationnelles et dans la particularité de leurs vécus, et non uniquement comme une ressource financière. Elle a ensuite démontré comment les coopératives enrichissent l’histoire des peuples. Susanna a aussi évoqué les origines des coopératives en Inde, en Chine, en Afrique du Sud ainsi que dans les communautés autochtones d’Amérique du Sud.
Parmi les communautés autochtones de l’île de la Tortue, Susanna a précisé que « les modèles culturels de coopération économique étaient manifestement ancrés dans toutes les collectivités ». Elle a ajouté que les peuples colonisateurs n’ont jamais été les fers de lance des valeurs de coopération économique et d’économie solidaire; celles-ci sont plus plutôt l’apanage des peuples opprimés. Nous avons aussi appris les cinq principes de l’économie solidaire et les façons de les incarner dans nos pratiques organisationnelles :
- Redevabilité et relations
- Culture de libération
- Ressources partagées et vision commune
- Démocratie et processus
- Éducation et développement du leadership
Par ailleurs, Susanna a souligné la pertinence de lancer des projets gérés par et pour les citoyen·ne·s, selon la devise « Rien sur nous sans nous ».
Juliet ‘Kego Ume-Onyido, Black Women Professional Worker Co-op (BWPW)
Juliet a présenté son organisme en partageant ses principes directeurs, notamment la dignité, la sagesse autochtone et l’approche centrée sur l’être humain tout en expliquant le raisonnement derrière ces choix. La coop BWPW trouve ses assises dans la recherche et les données mises de l’avant par la théorie féministe noire intersectionnelle, élaborée par Funmilayo Ransen, une militante nigériane des droits des femmes, éducatrice et conseillère politique. Cependant, malgré l’excellent travail de la coop BWPW pour soutenir la libération financière des femmes par l’entrepreneuriat, les obstacles systémiques, le racisme institutionnel et les inégalités structurelles représentent un défi important pour ce groupe déterminé. Elle a évoqué ces facteurs et d’autres que la coop BWPW a dû surmonter pour se tailler une place sur les marchés locaux et internationaux. Le thème de l’événement posait la question « Que peut offrir l’économie solidaire aux communautés PANDC? », mais, selon Juliet, la question se pose autrement. Depuis des siècles, les groupes PANDC mettent en œuvre ces modèles économiques. Elle a donc suggéré de poser la question suivante : « Que peuvent offrir les personnes PANDC à l’économie solidaire? »
Juliet a poursuivi sa présentation en soulignant que les groupes privés d’équité ont depuis toujours de forts penchants pour l’économie solidaire, puisque ce modèle a servi à ériger des systèmes économiques fiables pour assurer leur survie. À l’époque précoloniale, le fonctionnement de royaumes africains entiers reposait sur les notions de réciprocité et de confiance socioéconomiques. Pendant des siècles, des philosophies recelant notamment le concept bantu d’Ubuntu (vous êtes, donc je suis) et l’expression igbo « Onye Aghana Nwanne Ya » (miser sur les valeurs de solidarité communautaire pour ne laisser personne dans la souffrance ou l’isolement) ont modelé les pratiques économiques africaines. Tout ceci guide notre compréhension de l’économie solidaire ou encore de la solidarité économique. Enfin, la présentatrice a fait le lien entre ces thèmes et le concept inuit d’Atautsikut (n’oublier personne).
Conclusion
Les pratiques vers lesquelles tend l’économie solidaire trouvent leurs assises dans les paradigmes économiques que les collectivités noires, autochtones et racisées épousent depuis des générations.
Ces valeurs ne portaient pas le nom d’économie solidaire à l’époque, mais celles-ci motivent toujours le souhait de renouer avec les principes de justice, d’équité, de diversité et d’inclusion économiques et communautaires. Pour conclure, Juliet a relevé certains aspects de l’économie solidaire qui gagneraient à être améliorés afin de créer des communautés de soin, d’encourager la prise de conscience et d’inspirer le courage d’apprendre et de réapprendre.
Pour en savoir plus :
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