Urbane Cyclist : la passion plutôt que les profits

Par Kenzie Love

On dit parfois « si vous aimez ce que vous faites, jamais plus vous ne “travaillerez”. » Ça peut sembler être un cliché, mais pour les membres d’Urbane Cyclist à Toronto, ce n’est pas si loin de la vérité.

Fondé en 1997, Urbane était alors dirigé par le défunt Eugene Yao. Ce dernier souhaitait créer un magasin de réparation spécifiquement pour les cyclistes qui utilisent le vélo pour se rendre au travail, une anomalie à Toronto à l’époque. Le magasin s’est ensuite orienté vers la vente de pièces et d’équipements, puis de vélos de ville, et a depuis élargi son offre au marché du cyclisme de loisir.

Owen Ardal, le président de la coopérative, ne s’est pas joint à Urbane spécifiquement pour son caractère coopératif. C’est plutôt l’accent mis sur le service à la clientèle, l’un des nombreux attributs coopératifs, qui lui a donné envie d’y rester. Bien qu’il travaille dans le domaine de la vente, il ne se considère pas comme un vendeur puisque, en somme, il ne fait que partager sa passion pour le vélo. 

« Ça ressemble à, “ Hé, je suis vraiment passionné par ceci, parlons de ce truc cool que j’adore” plutôt que “je vais vous vendre plein de bidules”, précise-t-il. Je pense aussi que ce qui est bien, ce qu’on n’a pas l’impression de travailler quand on fait ce que l’on aime. En plus, on a la chance de travailler en équipe et d’apprendre de nouvelles compétences. J’apprécie aussi l’engagement de la coopérative envers l’éducation. »

Reba Plummer a vécu une expérience tout aussi positive. Initialement propriétaire de son propre magasin de vélos à Toronto, elle a décidé après dix ans de cesser ses activités et de plutôt joindre Urbane, où elle travaille depuis 2001. Vingt ans plus tard, elle est heureuse de cette décision puisqu’elle peut combiner sa passion du cyclisme à un milieu de travail où elle n’est plus la seule responsable de tout.

« Je n’ai pas à tout décider, explique-t-elle. En étant plusieurs à prendre les décisions, ça crée un climat plus solidaire, ce que j’apprécie vraiment. »

La nature démocratique d’une coopérative de travail plaît à Ardal et à Plummer. Par contre, comme les deux membres le constatent, une démocratie en milieu de travail rend inévitablement les choses plus compliquées.

« Je plaisante souvent en disant que la force d’une coopérative est aussi sa faiblesse, déclare Ardal. C’est parce que les choses se font démocratiquement. Je vois cela comme une véritable force, mais je pense que ce qui est exigeant, c’est d’allouer le temps nécessaire, de s’assurer que tout le monde est à bord, que chaque personne a une voix et est entendue. C’est un processus plus lent et ça peut demander plus de travail aussi. Vous savez, quelqu’un peut avoir une opinion très forte et penser qu’une chose doit se faire d’une (certaine) façon. »

Ardal estime néanmoins qu’à long terme la démocratie permet de meilleures prises de décision. Comme le souligne Plummer, les membres ont compris que la plupart des enjeux auxquels leur coop fait face sont les mêmes que dans tout le secteur, peu importe le type de coopérative de travail. Plummer et Ardal sont d’accord que faire partie de la FCCT et assister à des événements comme des conférences a été éclairant à cet égard.

« Des événements comme les conférences de la FCCT sont utiles, dit Plummer. Je sais que souvent on se dit, “pourquoi j’assisterais à cette conférence? Je brasse de la bière et vous êtes un magasin de vélos. Qu’avons-nous en commun ?” Puis quand on y participe, on découvre qu’on a de nombreuses choses en commun. »

Urbane trace encore son chemin pour les années à venir, mais espère recommencer l’organisation de randonnées de groupe après la pandémie, tout en augmentant sa présence sur les réseaux sociaux et en continuant à offrir plus d’options en ligne pour sa clientèle. Si ce qu’elle vend peut continuer à évoluer, la façon dont elle vend – en s’efforçant d’offrir les meilleurs produits plutôt que de récolter les meilleurs profits – demeurera la même.